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VIDÉOSURVEILLANCE


LE DÉBAT TRUQUÉ

Big brother vous aime...

No Pasaran !  N° 64 Février 1999



Il est important  de savoir que le territoire national est occupé par la présence d'un million et demi de caméras de surveillance, autant dans le secteur privé que public. Ce chiffre étant en constante augmentation, il va sans dire que cette infrastructure n'est pas implantée d'une manière aléatoire, mais répond à une stratégie bien définie par les règles qui régissent toutes les formes du contrôle social. Le coup des installations est tel qu'il ne peut être l'objet du hasard et dépourvue d'une implantation tacticienne.



Par ailleurs, nous avons deux versions officielles et contradictoires concernant les problèmes de sécurité, que Chevènement nomme "droit à la sûreté", ce qui permet de stigmatiser systématiquement la petite délinquence. les mairies qui se sont équipées ont dans leur ensemble tendance à considérer la vidéosurveillance comme bienfaitrice du point de vue de la délinquence de rue. Il n'en va pourtant pas de même lorsqu'il s'agit du discours du ministère de l'intérieur qui prétend, quant-à lui, que la délinquance urbaine et les "incivilités" auraient tendance à augmenter de nouveau et qu'il serait urgent d'envisager des mesures coercitives complémentaires à celles qui existent déjà.

Sachant que des dispositions comme celle proposée par le député Jean-Pierre Brard, votée à l'assemblée nationale en novembre 1998, qui vise à incorporer le NIR aux fichiers fiscaux, sachant également que cette mesure préfigure la fabrication d'un fichier centralisé, auquel manquerait l'adjonction d'une représentation comportementale en texte et en images, glanée ici et là dans les institutions d'Etat et chez les fournisseurs du secteur privé, à laquelle s'ajouterait à terme la constitution complémentaire d'un fichage génétique et généalogique, tel qu'il a été proposé recemment en Islande, ou sur notre territoire par l'actuel Garde des Sceaux Gugoux, il s'agit de savoir jusqu'où cela va aller, au nom de quelle sécurité citoyenne et face à quelle délinquence, qui baisse ou augmente selon les intérêts immédiats des pouvoirs concernés. Car, si la vidéosurveillance se déclare comme solution face à la délinquance, elle s'avère être également uns source de profits non négligeables, en ce qui concerne par exemple l'intervention immédiate des services de fourrières, la surveillance des salariés dans les entreprises publiques et privées pour accroître les rendements, les habitudes comportementales piégées dans les grands magasins afin d'optimiser les ventes, la consolidation du rôle de l'Etat policier qui défend la répartition inégalitaire des richesses, etc. Tout cela contribue à la forte croissance actuelle du marché de la surveillance électronique et informatique.

Les grands médias ont l'air de si'intéresser depuis quelques temps au phénomène d'implantation de la vidéosurveillance. Ce qui apparaît dans leurs conclusions est de constater que le débat sur la vidéosurveillance est constitué d'opposants et de défenseurs, en réduisant ce mode de contôle social à une simple formalité sociétale admise au sein du débat démocratique et poussée par l'évolution technologique comme une évidence de confort moderne.


SURVEILLANCE DES PAUVRES 

Il est encore souhaitable et nécessaire de souligner les effets pervers et aliénants de telles disositions, plutôt que mettre, d'une manière obsessionnelle, l'accent sur une hypothétique délinquance de rue ou prétendre qu'il y a un risque éventuel d'intrusion dans la vie privée, alors que l'intrusion est avérée de longue date par l'omnoprésence croissante du contôle social sous toutes ces formes. Ce qui n'est pas avéré, ne disposant pas, pour nos conclusions, de statistiques précises concernant son augmentation, ainsi que les lieux où elle opère, c'set la nature réelle de la délinquance. On nous dit que la délinquance augmente, mais on ne sait pas qui fait quoi et dans quelle mesure. Aucune statistique comparative ne nous permet de confronter toutes les formes de la délinquance couvrant le spectre social dans son ensemble.Le ministère de l'intérieur semble particulièrement attaché à la petite délinquance urbaine alors qu'il ignore scrupuleusement les autres formes de délinquance. Il s'appuie sur le phénomène qui sévit dans les banlieues, en le réduisant à une violence ordinaire et de droit commun, alors qu'il s'agit des conséquences désespérées face à une politique discriminatoire et mortifère menée consciemment et avec la plus grande injustice, par les diverses composantes du ministère de l'Intérieur lui-même. Nous savons que les quartiers qui "brûlent" sont une réponse au cpoup par coup aux assassinats et aux violences ordinaires, commis par les fonctionnaires de police.
Il s'agit maintenant d'appréhender quelle délinquence le contrôle social, vise à contenir. Qu'en est-il, en d'autres termes, des délinquences politiciennes, policières, sanitaires, écologiques et économiques, et les projections sécuritaires des grandes institutions sont elles réellement objectives et par conséquent, fondées ?
Les politiques de désinformation des grands organes de presse ne se font-elles pas complices de la criminalité et des exactions policières en mettant l'accent sur le droit à la sûreté revendiqué par le ministère de l'intérieur, alors qu'elle fait l'impasse sur les enjeux réels de ce que ce même ministère appelle la sécurité des citoyens ?  Amalgammes et confusions qui permettent à l'Etat de réorganiser ses moyens de contrôle et de reppression par des croisements de fichiers, ainsi que des fusions avec le fichage privé et patronal, en démontrant la nécessité de globaliser la surveillance, faissant de la petite délinquence l'objet de tous les durcissements, alors qu'il se montre d'une indulgence qui confine à la parodie en ce qui concerne la grande criminalité institutionnelle. Toutes ces violences institutionnnelles, tous ces manquements aux droits imprescriptibles de la personne humaine, mises en oeuvre par des experts, prestataires de service de la répressionet de la contrainte sur les citoyens, sont également comptabilisées par un nombre croissant d'organisations associatives, dont les militants, ne resse,tent aucune indignité à qualifier leur action de résistance à ce que l'on pourrait désigner comme une résurrection fasciste.



Thierry Cheverney. No Pasaran
















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